Eugenia
Cheng est à la fois mathématicienne et maître de conférences à
l'Institut d'art de Chicago. Elle est devenue célèbre en publiant
How To Bake Pi, livre dans lequel elle parle de mathématiques
à travers des recettes de cuisine. Aujourd'hui, elle publie un
nouvel ouvrage : Par-delà l'infini. Entretien.
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Eugenia Cheng est une mathématicienne britannique qui propose une approche ludique des mathématiques. (Photo : DR) |
Vous
affirmez vouloir « débarrasser le monde de la phobie des
maths ». Mais maintenant qu'elle est installée, comment
voulez-vous la faire disparaître ?
Eugenia Cheng : « Malheureusement,
les maths que nous enseignons à l'école sont rarement utiles dans
la vie de tous les jours. Les gens se demandent : "À
quel moment de ma vie vais-je avoir besoin de résoudre une équation
à quatre inconnues ?" Les maths que j'enseigne, eux,
reposent sur un schéma de pensée plus pragmatique, plus intuitif.
Pour cela, j'essaie de les rattacher à des situations que nous rencontrons tous les jours. »
How
To Bake Pi a été un succès en librairie. Pourquoi avez-vous utilisé la cuisine pour explorer
les mathématiques ?
« Quand
je fais cours, je raconte toujours une anecdote pour que mes élèves
puissent relier les maths à la vie réelle. Et je me suis aperçue
qu'à chaque fois qu'une anecdote touchait à la nourriture, ils
étaient tous très attentifs. Une fois, un étudiant m'a demandé "Parlez-nous de mathématiques avec des cookies", et
j'ai réalisé que je pouvais faire un cours entier en tissant une
analogie avec l'alimentaire. »
Quelle
est votre recette mathématique préférée ?
« Celle
du mille-feuilles. C'est celle que j'ai faite à la télé avec
Stephen Colbert et ça s'est terminé par un duel au rouleau
pâtissier (voir la vidéo ci-dessous). Bien que la
pâte feuilletée soit assez difficile à faire, elle permet
d'illustrer le principe des exponentiels. »
En
recourant à la cuisine pour parler de mathématiques, ne
craignez-vous pas d'envoyer le message qu'ils ne peuvent être
intéressants que par analogie ?
« En
vérité, les mathématiques sont le socle de toutes les analogies.
Ce que j'essaie de faire, c'est de proposer un chemin vers quelque
chose d'assez complexe. Beaucoup de gens tirent leur sentiment
d'estime de soi car ils parviennent à comprendre des choses que
d'autres ne comprennent pas. Je prends le contre-pied de cette
logique. »
Dans
Par-delà l'infini, vous abordez l'un des concepts les plus
insaisissables des mathématiques. Quelle est la chose la plus
étonnante de l'infini ?
« À
l'instar des illusions d'optique, l'infini fait partie des choses
avec lesquelles j'aime ne pas être à l'aise. Lorsque j'en parle,
j'ai parfois le sentiment de flotter dans un rêve étrange... Mais
lorsqu'on parvient à appréhender cette notion, l'illusion
disparaît. »
La
logique a-t-elle ses limites ?
« Certainement,
mais les limites sont mouvantes. Prenons cette image : la
logique est une sphère placée au centre de nos pensées. À chaque
fois que notre compréhension des maths s'affine, nous mettons plus
de choses dans cette sphère et elle grandit. La plus belle partie,
c'est la frontière entre ce que nous comprenons logiquement et ce
qui fuit notre intuition. C'est en repoussant cette frontière qu'il
devient possible d'accéder à la beauté. »
Retrouvez l'intégralité de cet entretien sur le site de The Guardian.
Retrouvez l'intégralité de cet entretien sur le site de The Guardian.
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